Rien de nouveau à bord et, pourtant, une impression d’augmentation des incivilités et de l’énervement des personnes au volant.
Qui ne s’est jamais fait huer en conduisant à 30 km/h dans une zone où la vitesse est, justement, limitée à 30 km/h ?! Qui ne s’est jamais fait forcer le passage, sûrement pour un rendez-vous « urgentissime »… ? Et je vous passe les insultes, parfois les crachats… Si, si, je vous assure, c’est du vécu !
Récemment, sur un passage à voie unique et prioritaire, un 4X4 s’est engagé alors même que deux véhicules circulaient déjà sur la voie : il avait la priorité, certes, mais a choisi d’ignorer les véhicules déjà là… C’est sûr, un 4X4 contre une Fiat Panda, il y a déséquilibre.
Ces incivilités quotidiennes devenant ridicules, essayons de comprendre ce qui peut expliquer de tels agissements.

Une revue automobile anglaise nous renseigne sur le lien indéfectible des hommes avec leurs automobiles. Mais messieurs, ne prenez pas ombrage, je pense que cela peut aussi s’adresser aux dames.
La voiture est décrite comme le dernier rempart de la virilité : elle représente souvent un lourd investissement financier et requiert un soin particulier à devenir rutilante et unique en son genre, à en croire les lavages réguliers et méticuleux. C’est également un signe extérieur de réussite et de confiance en soi : gros cylindre, sensation de contrôle et de puissance. Elle est souvent le compagnon refuge, compréhensif, contre les attaques et injustices de la vie (un psychologue raconte, dans un numéro du journal le Monde de 2013, que l’habitacle serait « comme la matrice maternelle »). En bref, la voiture est la version masculine du « Je n’reconnais plus personne en Harley Davidson » de Brigitte BARDOT.
Finalement, ces comportements particuliers des conducteurs traduisent-t-ils ce qu’ils sont réellement dans la vie ?
En partie, je le crains, car la conduite est un exutoire du stress de la vie quotidienne. Je vous l’accorde, certains feraient mieux de s’exciter sur un terrain de foot ou sur un chemin de randonnée. Elle met bien en exergue notre personnalité et, par certains côtés, traduit nos faiblesses et nos failles.
Un psychologue interrogé par le Monde rappelle que 76 % des tués sur la route sont des hommes : ils conduisent, il est vrai, 20 % de plus que la gent féminine qui, elle, est davantage au volant d’un moindre cylindré et roule plus fréquemment en milieu urbain.
Ainsi, il note que le choix des véhicules est relativement sexué et ne répond pas aux mêmes critères : vitesse et puissance pour les hommes, confort et sécurité pour les femmes… L’article conclut sur le nouveau champ de bataille que seraient les voies de circulation.
À l’éclairage de ce vibrant et vrombissant constat, je serai tentée de rappeler que l’important dans la vie ce n’est pas ce que l’on croit être mais ce que l’on est. Alors pour deux minutes de prise sur la vie, pour un peu de politesse en plus, pour un sourire d’excuse et un sympathique laissez-passer, j’ai envie de penser que cet aspect-là de l’Humanité va progresser vers plus de sagesse et de courtoisie. Le ridicule ne tue pas, mais la route, si !
Alors, vaillants conducteurs et gentes conductrices, un peu de zénitude ne nuit à personne. Pensez-y : contact, musique, respirez… et la vie n’en sera que plus belle.
Cathy MARROT