Origines

 

Selon les historiens Félix PASQUIER et Gratien LEBLANC, les trois petits îlots de maisons ou moulons, qui se trouvent désormais entre la place proprement dite et l’église cathédrale, auraient été bâtis entre 1382 et 1417. Celui du milieu fait alors office de halle au blé en son rez-de-chaussée et sous son Couvert.

 

Faute de documents précis, on ne peut que supposer l’utilisation de l’étage pour des réunions de marchands, un éventuel tribunal pour les délits strictement associés au commerce et aux marchés, et peut-être une cellule d’enfermement pour les vendeurs reconnus coupables.

 

Au XVIIIe siècle

 

Plan de Mirepoix, 1766, AD09, 31EDT/CC3, vue 6/119 (archives départementales)

 

Selon le plan aquarellé de 1766 conservé aux archives départementales, l’emplacement de la halle actuelle était occupé par un groupe de quatre habitations, dont le premier étage reposait sur des piliers de chêne pour former un Couvert. Ces maisons font suite à l’ancienne halle au blé, du moins pour le premier étage. Sur l’image, le Couvert est représenté par des X pointillés et de petits rectangles indiquent les piliers. Ce petit moulon était entouré par la rue Courlanel (actuelle rue Clauzel) au sud, la place au nord, la « rue de l’église » à l’ouest, et la « rue de l’argent » à l’est, qui n’est pas indiquée sur le plan.

 

Les parcelles appartenaient à Jean Pierre SOUM, marchand (176), Pierre BAUZIL, baigneur (177), Joseph GAILHARD, bourgeois (178), et aux « Messieurs du vénérable Chapitre de Mirepoix » (179), comme l’indique le compoix (registre foncier) de 1766, également conservé aux archives départementales.

 

Parcelle 176 – Jean-Pierre SOUM

 

Parcelle 177 – Pierre BAUZIL

 

Parcelle 178 – Joseph GAILHARD

 

Parcelle 179 – Chapitre de Mirepoix

 

Selon la description de chaque parcelle, on apprend des détails du quotidien : les maisons de Jean Pierre SOUM (176) et Pierre BAUZIL (177) étaient mitoyennes et imbriquées, et le premier avait « l’usage et le passage de l’escalier » dans la maison de son voisin. Le marchand Jean Pierre SOUM, dont on ne sait pas plus précisément en quoi consistait son commerce, peut-être des tissus et de la mercerie, devait rencontrer dans cet escalier la famille BAUZIL. L’installation de bains payants de « Pierre BAUZIL, baigneur » devait se trouver en rez-de-chaussée.

 

Le compoix précise que ces maisons sont situées « au Couvert de midy la place » et que les parcelles 177 et 178  se trouvent « vis à vis les mesures de bled », que l’on voit dessinées sur le plan. Ces mesures pour le commerce du grain étaient posées sur une sorte d’estrade, à laquelle on accédait par quelques marches. Au nombre de dix, elles ont été remplacées pendant la Révolution par des mesures en décalitres dont il ne reste que les deux placées de part et d’autre de la porte de l’Office de tourisme du Pays de Mirepoix.

 

Au XIXe siècle

L’écrivain Melchior Frédéric SOULIÉ (Foix, 23 décembre 1800 – Bièvres, 23 septembre 1847) a peu vécu à Mirepoix, mais vouait un attachement indéfectible à cette petite ville, berceau de sa famille maternelle. Dans son livre Deux séjours – Province, Paris, il décrit la place, entourée d’arcades de bois, où se tient le marché, et précise que « de vastes setiers en pierre, où se mesurent le blé et les grains » se trouvent sur un petit amphithéâtre, sur un côté de la place. Vers 1830, ces mesures à grains sont donc encore en usage.

 

Mesure à grains

 

Les maisons du siècle précédent ne sont pas entretenues, tombent en ruines et Mirepoix n’a plus de halle proprement dite, à la fin du XIXe siècle.

 

Le 25 avril 1877, le sous-préfet de l’Ariège écrit au préfet pour l’informer que le maire de Mirepoix charge Casimir OLIVE, chef d’escadron en retraite à Mirepoix, de dresser les plans et devis relatifs à la reconstruction de la halle aux grains et à la restauration de l’hôtel de ville. Il est choisi en remplacement de M. CALS, architecte à Carcassonne, lequel a renoncé à la mission qui lui avait été confiée le 7 octobre précédent.

 

Plan de Casimir OLIVE refusé

 

Le plan proposé par Casimir OLIVE le 5 mai 1877 est rejeté le 4 mars 1879 par la Commission des Travaux Publics et le Conseil Général des Bâtiments Civils. Le projet est ensuite confié à M. FIQUET, architecte départemental, qui remet son plan le 8 mai 1882 à Louis PONS-TANDE, maire de Mirepoix. Ce dernier projet prévoyait une « plate-forme supportant les mesures en fonte », située au beau milieu de la halle …

 

Emplacement parfait pour le commerce du grain, mais peu pratique pour tout autre commerce ou étal. Si ce projet a été réalisé, il a été modifié, et les mesures sur leur estrade ont été repoussées vers le côté sud de la halle, où elles sont demeurées longtemps puisqu’elles sont visibles sur des cartes postales anciennes comme en témoigne l’image ci-dessous.

 

Carte postale ancienne sur laquelle on distingue les mesures à grains sur une estrade

 

Par ailleurs, le projet de M. FIQUET ressemble fort au projet refusé de Casimir OLIVE … La nouvelle halle est inaugurée en 1885.

 

De nos jours

La halle de Mirepoix est toujours halle de marché les lundis et jeudis matins, mais aussi lieu d’animations multiples (vide-greniers, expositions, concerts, salon du livre, soirées moules-frites et musique en été, brocantes et vieux papiers, festival Swing, démonstrations de danse, marionnettes, marchés de Noël, aire de jeux pour enfants, etc.).

 

La Halle aujourd’hui

 

Elle a perdu ses mesures à grains mais conserve sa silhouette en fonte et métal proche des halles parisiennes de la même période. Le sol refait en 1990 est en marbre des Pyrénées, matériau languedocien par excellence.

 

Pour une raison ou une autre, un jour ou l’autre, vous aurez rendez-vous sous la halle !

 

Martine ROUCHE

Guide conférencier