Hémicycle du Sénat avant les questions au gouvernement le 12 janvier 2017
© stéphane bourdoncle

 

Au cours des derniers mois, pas moins de trois séances ont mené nos deux Ariégeois auditeurs de l’Institut du Sénat : Fabien Guichou et Stéphane Bourdoncle, au Sénat et à Strasbourg. Un marathon parlementaire, qui leur a fait découvrir le Sénat bien sûr, et les institutions européennes de la capitale alsacienne.

 

Au cours des prochains numéros, nous les suivrons au fil des thématiques abordées durant ces trois séquences. Nous découvrirons un vocabulaire spécifique, une organisation complexe entièrement mise au service des droits des citoyens et des citoyennes. C’est ce qui apparaît de l’intérieur comme le plus frappant, mais nous y reviendrons !

 

La séquence des 6 et 7 décembre a mis en évidence la spécificité du parlement français et en son sein du Sénat. Un parlement, c’est là où se décide la loi, où elle se discute puis se rédige et enfin se vote. Le parlement français est composé de deux assemblées ou deux chambres : l’Assemblée nationale et le Sénat. Cette organisation s’inscrit dans une longue tradition institutionnelle depuis la Révolution, avec le Directoire et le consulat puis le premier empire qui comptait quatre chambres, Napoléon ayant divisé le parlement pour mieux le dominer. Mais entre 1789 et 1795 il n’y avait qu’une seule chambre, tour à tour constituante, législative ou convention. La constituante et la convention sont des noms attribués à des assemblées pour décider d’une constitution. Depuis, seule la seconde République a été monocamérale, c’est-à-dire à une seule chambre, les autres républiques ont toutes été à deux chambres. La raison était de tempérer les ardeurs politiques d’une des deux chambres par la seconde. Le personnel étant élu différemment, leur position politique en est disparate. Victor Hugo résume ainsi la chose : « La France gouvernée par une chambre, c’est l’océan gouverné par un ouragan ». Tout est dit. Alors pour éviter les tempêtes de la Terreur entre 1793 et 1794 ou bien des querelles politiques, le révolutionnaire Boissy D’Anglas parle de cette séparation comme d’une digue entre l’imagination d’une chambre et la raison de l’autre.

 

Dès lors, le Sénat apparaît comme une assemblée moins portée aux clivages politiques, plus centrée sur la recherche du compromis. NON ! Ce mot n’est pas un gros mot. Vu de l’intérieur, il signifie discussion, échange de vues, confrontation de points de vue et d’opinions dans un seul et même objectif : rechercher et trouver un terrain d’entente dans l’intérêt général. Cette idée de stabilité politique se retrouve dans l’image de modération, de complémentarité de l’Assemblée nationale. Vous l’aurez bien compris : l’Assemblée est mieux vue que le Sénat. Et l’histoire ne le dément pas ! Ne désigne-t-on pas le Sénat comme la haute assemblée, appellation conservatrice, ou bien la deuxième chambre, en suivant de la première l’Assemblée… Ici, l’image est peu valorisante. Mais son rôle n’est pas aussi ronflant qu’on pourrait le croire. Certes on connaît tous et toutes le train de sénateur, qui s’avère plus intense et rapide qu’on pourrait le croire.

 

Entrons dans la machine législative…

 

Le Sénat, comme l’Assemblée d’ailleurs, fonctionne avec plusieurs instances. Sur nos écrans on peut voir les sénateurs dans l’hémicycle. Cette vision du travail de sénateur ou de députés d’ailleurs constitue la partie émergée de l’iceberg du travail de parlementaire.  Il n’y a pas d’heure pour un sénateur consciencieux et désireux de mettre ses compétences et son énergie à profit de ses concitoyens et des collectivités territoriales qu’il représente (communes, département et régions). Le travail du sénateur se divise en deux parties : l’une publique et l’autre plus confidentielle, mais tout aussi fondamentale pour la loi et nos droits.

 

Publique, elle se déroule dans l’hémicycle, où les sénateurs participent à des séances publiques de débat des lois, ou de votes d’articles, d’amendements (modification d’un texte de loi) ainsi qu’aux séances de questions au gouvernement. Ce dernier est responsable devant le parlement de la politique qu’il mène.

 

En dehors de l’hémicycle, bien que les séances soient filmées et en ligne sur le site du Sénat, les sénateurs participent à des réunions de création de la loi. Elles se déroulent en commission ou en délégation. Chaque sénateur doit être inscrit dans une des huit commissions du Sénat et peut participer à plusieurs délégations. La commission est une instance officielle en vue de créer la loi. La délégation, quant à elle, ressemble à une commission, mais ne peut pas rédiger de texte de loi ni les modifier, son travail consiste à publier des rapports sur des thèmes qui peuvent être repris dans les commissions. Commission ou délégation ont en charge un domaine.

 

Les 11 et 12 janvier, nos deux auditeurs ont eu la possibilité d’assister à une commission, celle des affaires européennes et à une délégation, celle aux droits de la femme. À cette occasion, ils ont pu observer certains aspects intéressants de notre fonctionnement institutionnel.

 

Aux affaires européennes, ils ont pu constater que les textes européens sont tous visés par les parlements nationaux en Europe dans chaque pays. Aucune décision prise à Bruxelles à la Commission européenne ou au parlement européen à Strasbourg n’entre en vigueur sans un accord validé par le suant ou l’Assemblée nationale. Ceci implique que le rôle des parlementaires est fondamental dans le processus de prise de décision européen. Cela signifie que nous, citoyens et citoyennes par notre vote aux législatives détenons dans notre bulletin le pouvoir d’influer sur les décisions prises à tous les niveaux national ou européen. Il en va  de même aux sénatoriales pour les grands électeurs (membres des conseils municipaux, départementaux et régionaux). Les critiques de la technocratie ne tiennent plus, dès lors quand on s’aperçoit de ce fonctionnement.

 

Le 12 janvier 2017, la délégation aux « droits des femmes et à l’égalité femmes-hommes » a remis un rapport dans le cadre de la loi égalité et citoyenneté sur « la laïcité garantit-elle l’égalité femmes-hommes ? » Au cours d’une réunion publique où sont intervenues des représentantes d’associations, des cultes, etc… La présidente de la délégation, la sénatrice Chantal JOUANNO a présenté un travail inauguré en mars 2015 sur l’égalité femmes-hommes. Le travail des sénatrices de la délégation a consisté à mener des auditions de personnalités de la société civile, à formuler des solutions sous forme de préconisations dans ce rapport de 355 pages, publié en novembre 2016.

 

Pour résumer : au Sénat, se jouent nos droits et notre avenir, que nous tenons entre nos mains dans l’isoloir. Certes, il suppose de notre part de la vigilance, mais aussi de la part des élus leur responsabilité qui ne se mesure pas au nombre de questions posées en séances, ni à la présence en hémicycle. C’est une présence plus étoffée et plus rigoureuse, loin des lumières des médias.

 

Ce n’est qu’un bref aperçu du travail de sénateur ou mené au Sénat ; mais il va se poursuivre dans les numéros suivants du bulletin.

 

À suivre…